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Dans une publication qui fait la couverture du journal Applied Physics Letters, une équipe internationale de chercheurs a démontré une technique novatrice pour augmenter l’intensité des lasers.
Pour générer une impulsion la plus courte possible, les chercheurs exploitent les effets de l’optique non linéaire.
Cette approche, basée sur la compression des impulsions lumineuses, permettrait d’atteindre une intensité seuil pour une nouvelle physique qui n’a jamais été explorée auparavant : les phénomènes d’électrodynamique quantique.
Depuis l’invention de l’amplification par dérive de fréquence en 1985 par Donna Strickland et Gérard Mourou, la puissance des lasers a augmenté de façon phénoménale pour finalement plafonner depuis quelques années. De nombreux groupes de recherche pallient cette situation en amplifiant l’énergie du laser pour accroître sa puissance, mais cette approche coûteuse nécessite des faisceaux et de l’optique très large, de plus d’un mètre.
Les chercheurs Jean-Claude Kieffer de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), Efim A. Khazanov et Sergey Mironov de l’Institute of Applied Physics of the Russian Academy of Sciences, et Gérard Mourou, professeur émérite de l’École polytechnique de Paris récompensé par le prix Nobel de physique en 2018, ont choisi une autre direction pour atteindre une puissance de l’ordre de 10^23 Watts (W). Plutôt que d’augmenter l’énergie du laser, ils diminuent la durée de l’impulsion jusqu’à quelques femtosecondes. Cela permettrait de maintenir les dimensions du système à une taille raisonnable et de conserver des coûts d’exploitation moins élevés.
Pour générer une impulsion la plus courte possible, les chercheurs exploitent les effets de l’optique non linéaire. « On envoie un faisceau laser à travers une lame de verre extrêmement mince et parfaitement homogène. Le comportement particulier de l’onde à l’intérieur de ce milieu solide élargit le spectre et permet d’avoir une impulsion plus courte lorsqu’elle est recomprimée à la sortie de la lame », explique Jean-Claude Kieffer, coauteur de l’étude publiée en ligne le 15 juin 2020 dans le journal Applied Physics Letters.
Installés dans le Laboratoire de sources femtosecondes (ALLS) de l’INRS, les chercheurs se sont limités à une énergie de 3 joules pour une impulsion de 10 femtosecondes, soit 300 térawatts (1012W). Ils prévoient répéter l’expérience avec une énergie de 13 joules sur 5 femtosecondes, soit une intensité de 3 pétawatts (1015 W). « Nous serions dans les premiers au monde à atteindre ce niveau de puissance avec un laser qui possède des impulsions aussi courtes », souligne le professeur Kieffer.
« Si nous arrivons à des impulsions encore plus courtes, nous entrons dans des classes de problèmes relativistes. C’est une direction extrêmement intéressante qui a le potentiel d’amener la communauté scientifique vers de nouveaux horizons », rapporte le professeur Kieffer. « C’était un très beau travail qui a permis de consolider le potentiel primordial de cette technique », conclut Gérard Mourou.
À propos de l’étude
L’article « Thin plate compression of a sub-petawatt Ti:Sa laser pulses » par S. Yu. Mironov, S. Fourmaux, P. Lassonde, V. N. Ginzburg, S. Payeur, J.-C. Kieffer, E. A. Khazanov, and G. Mourou a été publié en juin 2020 dans le journal Applied Physics Letters. Ceux-ci ont bénéficié du soutien financier du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, Fondation canadienne pour l’innovation, du ministère de l’Économie et de l’Innovation du Québec et du Ministry of Science and Higher Education of the Russian Federation.
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