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Sur une structure de la taille d’une pièce de 10 cents, des chercheurs de l’INRS et de la University of Sussex ont créé un dispositif optique qui, à l’aide de l’intelligence artificielle, contrôle les propriétés de la lumière.
Au cœur des systèmes d’imagerie biomédicale et d’une foule de technologies, on trouve des lasers qui se doivent de produire une lumière aux propriétés bien précises selon l’application. Pour y arriver, des systèmes optiques permettent de façonner et de contrôler les caractéristiques de la lumière des lasers, avec certaines limitations pour l’utilisateur.
Aujourd’hui, des chercheurs parviennent à miniaturiser des outils optiques et à les regrouper sur ce qu’on appelle une puce optique. Tenant sur le bout d’un doigt, la puce optique constitue un véritable parcours à obstacles pour la lumière qui la traverse, modifiant au passage ses propriétés. Le perfectionnement d’une puce offre, comme le dévoilent le professeur Roberto Morandotti et une équipe internationale de recherche dans un article publié dans Nature Communications, de nouvelles possibilités scientifiques et technologiques.
Qu’il s’agisse de la durée de l’impulsion lumineuse produite par le laser, de sa forme, de sa couleur ou d’autres paramètres avancés, on cherche à accroître toujours davantage le contrôle des lasers : chaque caractéristique sur laquelle on peut agir ouvre un nouvel éventail de possibilités d’applications. Or, jusqu’à présent, ce contrôle était limité à certaines caractéristiques des impulsions et nécessitait des dispositifs coûteux, encombrants ou difficilement évolutifs.
Pour pallier ces limitations, de nombreuses propositions ont été envisagées théoriquement, comme c’est le cas de l’utilisation de plusieurs impulsions lumineuses combinées. Malheureusement, le recours à la combinaison d’impulsions lumineuses se bute à un obstacle opérationnel de taille : le nombre de combinaisons possibles est simplement trop élevé et complexe pour être traiter par une approche numérique ou expérimentale traditionnelle. Cependant, cette avenue de recherche avait un potentiel trop important pour l’abandonner. Profitant de la grande polyvalence, de la stabilité et des propriétés uniques des systèmes optiques miniatures – les puces optiques intégrées – développées à l’INRS par le professeur Morandotti et son équipe, Benjamin Wetzel de la University of Sussex a mis sur pied une approche pour diviser et recombiner des impulsions lasers et ainsi contrôler de façon inédite leurs caractéristiques individuelles. Auteur principal de l’article, il obtient ainsi une formidable palette de possibilités.
« À partir de cette approche conceptuellement simple, nous avons la possibilité d’étendre de manière exponentielle l’ensemble de toutes les combinaisons possibles des paramètres du système que nous contrôlons. En modifiant seulement quelques variables dans cette puce, nous pouvons ainsi obtenir plus de 1036 configurations de formes d’impulsions pour contrôler notre système optique, plus que le nombre d’étoiles estimé dans l’univers ».
Benjamin Wetzel
Ces nombres astronomiques démontrent bien l’obstacle en termes de puissance de calcul que nécessite cette approche. Pour le surmonter, l’équipe internationale a lorgné du côté de l’intelligence artificielle. Un algorithme d’apprentissage automatique a été mis à contribution pour déterminer les meilleures combinaisons de paramètres pour obtenir précisément le type de lumière souhaité.
Pour les besoins de l’étude, à titre de preuve de concept, la lumière a été manipulée pour obtenir des supercontinuum. Ce sont des spectres lumineux élargis obtenus par des interactions intenses entre la lumière et la matière, maintenant utilisés dans un grand nombre d’applications technologiques. Comme le démontrent les résultats publié dans Nature Communications, la puce optique intégrée, couplée à l’utilisation de l’algorithme d’apprentissage, produit précisément un motif d’impulsions optimal pour fournir aux chercheurs les dynamiques physiques complexes recherchées.
Ces résultats enthousiasmants auront un impact dans de nombreux domaines, tant en recherche fondamentale qu’en recherche appliquée, puisqu’une grande part des systèmes optiques couramment utilisés dépendent des mêmes phénomènes que ceux déployés pour la génération de supercontinuum. De plus, le système proposé est peu coûteux, très compact et peut évoluer vers des systèmes plus complexes.
Le travail de l’équipe de recherche internationale pourrait mener au développement d’autres systèmes optiques intelligents utilisant des techniques d’auto-optimisation. Celles-ci pourront inclure le contrôle des peignes de fréquence optique (prix Nobel 2005) pour les applications en métrologie, les lasers auto-ajustés, le traitement et l’amplification d’impulsions lumineuses (prix Nobel 2018) ainsi que l’exécution d’approches plus fondamentales de l’apprentissage intelligent comme des systèmes basés sur des réseaux de neurones photoniques.
À propos de cette étude
Benjamin Wetzel, Michael Kues, Piotr Roztocki, Christian Reimer, Pierre-Luc Godin, Maxwell Rowley, Brent E. Little, Sai T. Chu, Evgeny A. Viktorov, David J. Moss, Alessia Pasquazi, Marco Peccianti et Roberto Morandotti, “Customizing supercontinuum generation via on-chip adaptive temporal pulse-splitting,” Nature Communications 9, 4884 (2018).
Les travaux publiés découlent d’une collaboration entre l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et la University of Sussex (Royaume-Uni). Le travail expérimental a été réalisé à l’INRS dans le laboratoire du professeur Morandotti dans le cadre d’un financement international Marie Curie. L’équipe internationale est constituée de chercheurs de l’INRS (Canada), de la University of Sussex (Royaume-Uni), de l’Académie chinoise des sciences (Chine), de la City University of Hong Kong (Chine), de l’Université ITMO (Russie) et de la Swinburne University of Technology (Australie).
L’équipe de recherche a reçu un support financier du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, du ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation du Québec, des Chaires de recherche du Canada, du Conseil de recherche australien, du Conseil européen de la recherche, de l’Union Européenne, du Conseil de recherche en sciences physiques et en génie (Royaume-Uni), du gouvernement de la Fédération de Russie et du programme 1000 talents du Sichuan (Chine).
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