- Vie universitaire
Le professeur Michel Charbonneau du Centre INRS–Institut Armand-Frappier nous a quittés le 27 juin 2013, laissant un héritage scientifique empreint d’humanisme et riche de promesses pour les personnes atteintes de cancer. Pour cela et tant d’autres choses, nous lui sommes infiniment reconnaissants pour son passage marquant à l’INRS. Il demeure un modèle de chercheur engagé et enthousiaste, pour qui la recherche fondamentale et appliquée se doit d’être au service du mieux-être de la population.
L’étude des effets réels de l’environnement sur la santé humaine a été au cœur des recherches de ce biochimiste et pharmacologue diplômé de l’Université de Montréal, qui a également effectué un stage postdoctoral au Chemical Industry Institute of Toxicology (maintenant nommé the Hamner Institutes) situé aux États-Unis. Ses travaux de recherche ont donné lieu à des avancées significatives dans le domaine de la toxicologie environnementale. En effet, le professeur Michel Charbonneau a contribué de façon importante à la mise au jour du mécanisme par lequel l’essence sans plomb, plus spécifiquement l’isooctane, induit le cancer. Cette découverte a permis à l’Environmental Protection Agency d’établir la réglementation quant à l’exposition humaine à certains produits commerciaux. Cet exemple constitue encore un cas unique cité à travers le monde. Plus près de chez nous, Santé Canada a validé la norme canadienne acceptable dans l’eau potable pour les cyanobactéries, grâce notamment aux recherches du professeur Charbonneau sur l’exposition orale à la toxine principale de ce type d’algues.
Pionnière dans l’étude des effets pulmonaires des vapeurs d’éthanol ajouté à l’essence à moteur, l’équipe du professeur Charbonneau a poursuivi des recherches avec le professeur Robert Tardif de l’Université de Montréal en vue de déterminer si les personnes asthmatiques y sont plus vulnérables. De plus, avec son collègue le professeur Daniel Cyr, Michel a élucidé des éléments clés du mécanisme par lequel un contaminant majeur des pays industrialisés, l’hexachlorobenzène, cause le cancer du foie chez la rate et non chez le rat.
Le professeur Charbonneau a également étudié le rôle des contaminants de l’environnement dans le développement de cancers du sein. De plus, son équipe, en collaboration avec des chercheurs du Centre hospitalier universitaire (CHU) Ste-Justine, a découvert une combinaison médicamenteuse et démontré son efficacité pour attaquer les cellules cancéreuses résistantes à la chimiothérapie, notamment dans le cas du cancer du poumon. « Il faut voir la cellule cancéreuse comme un tueur fou dont le but est de faire le maximum de dommages, et qui a plusieurs armes à sa disposition cachées dans ses tiroirs. Pour la neutraliser, il faut lui retirer chacune de ses armes, ce qui requière alors une série de clés. En utilisant des traitements conjugués, on augmente ainsi nos chances de déverrouiller toutes les serrures. L’important n’est pas tant l’organe où le cancer se fixe que le mode de fonctionnement de celui-ci, c’est-à-dire le type d’arme », expliquait Michel dans un article du webzine PlanèteINRS.
Menée en collaboration avec le Centre de recherche du CHUM et l’entreprise Uman Pharma, spécialisée dans la fabrication de médicaments, une étude clinique phase I/IIa est en cours de réalisation en vue d’évaluer l’efficacité de ce nouveau traitement chez des patients atteints du cancer du poumon. Tous les membres de l’équipe, incluant les partenaires et les collaborateurs, que le professeur Charbonneau avait réunis se sont engagés à poursuivre ce projet porteur d’espoir et qui lui tenait tellement à cœur. Un précieux legs et une histoire à suivre…
Scientifique passionné et travailleur infatigable, Michel Charbonneau est considéré comme un toxicologue réputé qui a grandement contribué à l’essor de cette discipline non seulement au Québec, mais également à l’échelle internationale. Il dirigeait le Réseau de recherche en santé environnementale du Fonds de recherche du Québec – Santé depuis 1999. À ce titre, il mentionnait dans une entrevue publiée dans Le Devoir : « Un des grands défis que nous avons, c’est d’être capable d’identifier quels sont les effets réels qui existent; on qualifie cela un peu comme relevant du domaine de l’analyse de risque. On ne fait pas face à des certitudes dans ce domaine-là et la difficulté provient en quelque sorte de l’incertitude qui existe autour d’une problématique ».
Toxicologue engagé, le professeur Michel Charbonneau a d’ailleurs mis son expertise au service des résidents de Shannon dans le dossier de contamination de l’eau potable au trichloréthylène (TCE), une substance cancérigène, en agissant comme témoin expert.
De plus, il a joué un grand rôle dans l’organisation du Congrès international de toxicologie qui a eu lieu à Montréal en 2007. Sa contribution scientifique lui a d’ailleurs valu des prix de la Society of Toxicology (États-Unis) et de la Société de toxicologie du Canada, dont il a assumé la présidence de 2005 à 2007.
En plus d’être un acteur important du développement de la recherche en santé au Québec et à l’INRS, le professeur Charbonneau a été une source d’inspiration pour la relève scientifique de grande qualité qu’il a formée dans le domaine de la santé environnementale, dont il peut être fier, et qui poursuivra son œuvre. Pour cela et pour tous ses accomplissements au sceau de l’excellence, nous lui rendons hommage.
Michel, merci pour ce que vous avez fait pour nous. Vous resterez toujours dans nos cœurs. ♦
Vous aimerez aussi
15 septembre 2021
La communauté de l’INRS au cœur du discours de la rentrée10 septembre 2021
Lancement du Réseau d’allié(e)s en santé mentale de l’INRS